À l’occasion de la campagne “Consommons coopératif”, nous avons rencontré Boris Calmette, président de Coop de France Occitanie. Il explique les nouveaux enjeux de la coopération.
À l’heure ou la société est en pleine mutation, le rôle des coopératives revient au premier plan. Comment expliquez-vous ce phénomène?
Dans une économie libérale, il est essentiel d’être capable de créer de la valeur et de la partager de façon équitable. Or, la coopération est un système démocratique, qui appartient collectivement aux agriculteurs et qu’ils gèrent eux-mêmes. Chaque personne représente ainsi une voix et est rémunérée en fonction de son travail. Le capital, lui n’est pas partageable. Cela permet donc aux entreprises d’être durables, puisque elles sont trans-générationnelles, et de partager la valeur créée sur un territoire, lequel est non délocalisable. Ce système regroupe un certain nombre de vertus, aujourd’hui particulièrement plébiscitées par les consommateurs. Pour ma part, j’ai fait le choix de l’aventure collective car je crois profondément que dans un monde globalisé, basé sur des règles d’économie libérale, la solidarité de proximité est une vraie réponse.
Quelle organisation la structure met elle en place pour répondre à ces changements profonds et s’y adapter ?
Coop de France, c’est historiquement un syndicat de défense des entreprises coopératives autour notamment des questions juridiques, fiscales et de défense des statuts. C’est par ailleurs une entreprise de services, qui propose aux agriculteurs un accompagnement pour l’aide à l’embauche, la formation, la RSE*, ou encore la mise en place du label HVE*. Il s’agit finalement d’une véritable boîte à outils au service des coopérateurs, qui permet en jouant collectif de bénéficier d’avantages économiques et financiers. Coop de France, c’est enfin un lieu de réflexion stratégique où sont débattues et amorcées les décisions concernant notamment les marchés de demain et les orientations qui doivent être prises. La structure évolue donc en permanence face aux changements de société et aux nouvelles attentes des consommateurs, auxquelles il s’agit pour nous de répondre. N’oublions pas que les coopératives sont au premier plan et donc en lien directe avec les consommateurs. Elles doivent de fait être très réactives.
Vous développez une campagne de communication “Consommons Coopératif”. Quel est l’objectif de celle-ci et comment s’inscrit-elle face aux évolutions liées aux nouvelles tendances de consommation ?
Quand on consomme coopératif, on consomme d’une part des produits de qualité mais on partage aussi un certain nombre de valeurs. La coopération s’inscrit dans cette dynamique-là, en permettant notamment à l’argent récolté de retourner sur son territoire. L’objectif de cette campagne est donc de faire la promotion des produits et valeurs qu’ils véhiculent. L’idée étant de sensibiliser et de proposer au public une autre façon de consommer. Il s’agit également de gagner de nouvelles parts de marchés, pour proposer un autre modèle économique plus égalitaire, incluant un rapport de proximité avec les consommateurs. L’écho de cette campagne est d’ailleurs aujourd’hui plus favorable qu’il y a deux ou trois ans. Il y a un véritable réveil des consciences autour des valeurs locales et des circuits courts.
La tendance est donc au retour vers les commerces de proximité et les circuits courts. Or, vous disposez d’un réseau de 400 caveaux boutiques. Qu’est-il prévu pour dynamiser celui-ci et en faire la promotion auprès des consommateurs ?
Dans le secteur du vin, les consommateurs ont le réflexe d’aller chercher leurs bouteilles directement dans les coopératives ou chez les vignerons indépendants. Et c’est tant mieux. Sur le reste des produits, c’est un peu plus compliqué. En outre, peu de marques sont identifiées par les consommateurs comme étant produites par des coopérateurs. Qui sait que le foie gras Montfort ou Labeyrie, ou encore la salade Fleurette ou le cidre Loïc Raison sont des marques de coopératives ? Alors cela relève certainement de la responsabilité des entreprises qui ne communiquent pas assez sur les marques et valeurs de la coopération. Mais face à la pression des consommateurs, quelques marques affichent désormais sur leurs étiquettes qu’elles sont des coopératives. Daucy en a d’ailleurs fait un argument de vente et le revendique fièrement. C’est dire à quel point les mentalités changent ! Aujourd’hui, il est donc nécessaire d’intégrer cette tendance pour communiquer sur les valeurs et les qualités de la coopération.
Comment la coopération s’adapte-t-elle enfin face aux nouvelles attentes des consommateurs et aux pressions sociétales concernant le respect de l’environnement ?
Aujourd’hui, il est nécessaire que la coopérative engage elle aussi de véritables changements de pratiques agro-environnementales pour répondre aux attentes de la société. De façon très concrète la coopérative viticole a ainsi signé des engagements au niveau national avec le ministre de l’Agriculture. Ainsi, 100% des caves seront engagées dans une démarche HVE, bio ou Terra Vitis d’ici 5 ans. Toutefois pour parvenir à ce résultat, il est nécessaire que Coop de France accompagne ses adhérents dans cette évolution, avec notamment de la formation. Pour ce faire, nous avons recruté un technicien amont qui oriente sur les bonnes pratiques et accompagne les vignerons sur les techniques liées à la traçabilité. Les choses se mettent donc peu à peu en place pour pouvoir changer tout un tas d’habitudes et de pratiques. Car il ne faut pas oublier que les changements profonds prennent du temps et demandent de la pédagogie. Sinon ce ne sont que des slogans…
* RSE : responsabilité sociétale environnementale / HVE : haute valeur environnementale
Coop de France Occitanie est née le 8 juin 2018, de la fusion de Coop de France Midi-Pyrénées et de Coop de France Languedoc-Roussillon. Son ambition est avant tout la représentation et la défense des adhérents, l’accompagnement des entreprises coopératives sur leurs marchés, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, l’accès au foncier et enfin la promotion de ses produits et de ses valeurs au travers d’évènements spécifiques.
Chiffres clés de la coopération en Occitanie :
336 coopératives,
27 unions de coopératives,
1 600 CUMA
160 filiales
15 000 salariés,
6,6 milliards de chiffre d’affaires,
9 agriculteurs sur 10 adhèrent à une coopérative
La coopération viticole en Occitanie :
230 caves coopératives et unions
16 500 adhérents, 5900 salariés
2 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Avec une production moyenne de 11 millions d’hl, la coopération représente 70% de la production régionale de qualité et d’origine.