Contraint par un dérèglement climatique de plus en plus prégnant et par un contexte économique instable, le vignoble héraultais a amorcé son virage écologique. Une nécessité pour survivre.
Accidents climatiques à répétition, maladies… les conséquences du dérèglement climatique sont nombreuses et lourdes pour la viticulture héraultaise. Cette année encore, les vignerons annoncent une baisse de la production de 20 à 30%, en raison de la sécheresse et de la canicule qui ont sévi en août. À cela s’ajoutent des facteurs déstabilisateurs au niveau économique et politique qui se multiplient. Crise mondiale des prix de l’énergie, envolée du coût des intrants, surcoûts liés au changement climatique, autant de facteurs qui menacent désormais la sécurité économique des exploitations.
Le Département soutient la filière
Conscient des enjeux, le président du Département, Kléber Mesquida a annoncé que des aides institutionnelles sont en cours d’étude pour compenser les pertes subies par les vignerons déjà affectés par l’inflation.
Lors de sa tournée des caves en septembre dernier, il a également rappelé : « Il n’est pas question de voir les vignobles disparaître dans 15 ou 20 ans ». Et de rajouter : « la bonne santé de la viticulture est cruciale pour l’environnement et l’économie de l’Hérault. Elle protège nos paysages des incendies et elle constitue notre 2e PIB derrière le tourisme, avec 800 millions d’euros annuels de revenus ».
L’agroécologie comme meilleure réponse
« Un tournant est donc nécessaire si nous voulons avoir une chance d’enrayer la disparition de notre patrimoine. Et il y a urgence ! » souligne Rodolphe Majurel, écologue et fondateur de Bativersité. Or, selon lui, « l’agroécologie constitue à ce jour la meilleure voie à emprunter pour s’adapter sur le long terme à la multiplication des crises économiques et climatiques ». Mais de quoi parle-t-on ?
L’agroécologie est un concept qui remet la biodiversité et les processus écologiques au cœur de l’agriculture. Elle vise à réduire les impacts environnementaux (sur l’eau, les sols, la biodiversité…) tout en répondant aux besoins économiques des exploitations, en leur permettant de diversifier leurs sources de revenu, mais aussi de gagner en autonomie pour mieux résister aux aléas climatiques et économiques.
Des solutions sur-mesure
De cette approche agroécologique découle un ensemble de pratiques que chaque exploitant adapte, conçoit et développe, en fonction des spécificités de son territoire et de la nature de son exploitation.
Les principaux leviers de l’agroécologie sont :
- la limitation du recours aux produits phytosanitaires et le développement de la protection des cultures par biocontrôle ;
- l’amélioration de la fertilité, de la vie microbienne et fongique ainsi que la capacité de rétention en eau des sols ;
- le développement d’infrastructures agroécologiques (haies, bandes enherbées, arbres isolés) ;
- le maintien de surfaces d’intérêt agroécologiques (talus, fossés, murs en pierres, mares) ;
- la régulation naturelle entre la faune et ses bioagresseurs ;
- la recherche d’assolements et de rotations adaptées (diversification des cultures).
L’agroécologie, la clé de la résilience
Le sixième rapport du GIEC indique que les pratiques agroécologiques permettent non seulement d’atténuer le changement climatique mais aussi de s’adapter à ses conséquences.
L’agroécologie engendre par ailleurs de nombreux co-bénéfices. Sur les aspects socio-économiques, les exploitations qui ont amorcé leur transition écologique sont en général moins endettées (économies d’intrants, meilleure gestion du capital) : elles sont donc plus facilement transmissibles.
La charge de travail y est substantiellement allégée. Enfin, l’agroécologie crée plus d’emplois et rémunère en moyenne mieux le travail.
Une pratique de plus en plus répandue
Pour toutes ces raisons, le nombre d’agriculteurs engagés dans une démarche agroécologique continue aujourd’hui sa progression dans le département de l’Hérault.
Les labels tels que l’Agriculture Biologique (AB) et la Haute valeur environnementales (HVE) en témoignent : 20% de la surface viticole est aujourd’hui conduite en AB dans l’Hérault contre 9% il y a 5 ans ; environ 1500 exploitations viticoles sont engagées en HVE avec une progression de 43% en 1 an.
Le Département engagé
Afin de contribuer au développement de l’agroécologie sur le territoire, le Département a décidé dans le cadre de sa politique agro-environnementale, d’accompagner les agriculteurs dans la mise en œuvre d’actions qui favorisent les milieux naturels et la biodiversité sur les parties non productives de leurs exploitations :
- distribution de capsules de phéromones, limitant ainsi les traitements phytosanitaires, tout en protégeant la ressource en eau : ce dispositif concerne en 2020 plus de 15% du vignoble héraultais ;
- achat de matériels agri-environnementaux collectifs par les Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole (CUMA) ;
- développement des démarches expérimentales visant la maîtrise de l’irrigation, de l’enherbement et de l’apport de matières organiques au niveau des sols ;
- développement d’infrastructures agro-écologiques avec la plantation de 20 km de haies et de 120 arbres isolés, la mise en place de 16 mares et la restauration de 7 ha de milieux ouverts.