L’image, la construction de la gamme de vins, le mode de communication et de distribution choisis par une cave coopérative sont autant d’aspects qui établissent son positionnement marketing et qu’elle peut être amenée à retravailler. Décryptages.
Le positionnement marketing d’une entreprise fait référence à la place qu’elle occupe dans l’esprit des consommateurs par rapport aux concurrents. C’est le positionnement « induit ». Il s’agit également de la place que l’entreprise veut occuper sur le marché et la façon dont elle souhaite être perçue par les consommateurs. C’est le positionnement « voulu ».
Si ces deux aspects concordent, alors l’entreprise a réussi à communiquer et transmettre le message ou les valeurs souhaitées.
Si les deux diffèrent, alors l’entreprise doit revoir son positionnement afin qu’il soit plus cohérent et davantage en adéquation avec ses valeurs.
C’est ce décalage qui a conduit Bernard Pallisé, directeur de Castelbarry, la cave coopérative de Montpeyroux, à faire appel aux services de Franck Pernet et d’Agnès Bœuf, responsable de l’agence AOC Conseils. « Malgré le potentiel énorme de nos vins, certaines bouteilles se vendaient peu ou mal et n’exprimaient pas clairement nos valeurs sociétales et nos engagements en termes d’environnement. En outre, la gamme ne reflétait pas la modernité et l’évolution constante de la cave. L’intervention d’experts marketing nous a ainsi conduit à une véritable remise en question tant de nos produits que de notre communication globale ».
Un premier diagnostic à réaliser
Le travail marketing consiste, dans un premier temps, à analyser l’ensemble des représentations mentales ou affectives et les jugements de valeur associés à une entreprise ou à une marque. « Il s’agit de décortiquer ce que perçoivent les consommateurs de la marque ou de l’entreprise. En l’occurrence, après une étude auprès d’un panel de consommateur, il s’avère que Castelbarry renvoie aux notions de sérieux, d’engagement, de rigueur, de stabilité, de pérennité, de curiosité, de culture, d’innovation, de responsabilité, de différence, de fierté, de convivialité, ou encore de franchise…» explique Agnès Bœuf, responsable de l’agence AOC Conseil.
L’objectif de ce diagnostic est également de déterminer les traits saillants de l’entreprise pour déterminer son identité. « Il s’agit de personnifier l’entreprise, de lui donner des caractéristiques émotionnelles et physiques, d’accentuer le trait, pour parvenir à définir son identité, ses valeurs, son style, son apparence » ajoute l’experte.
Ce premier diagnostic permet ainsi de révéler les points forts de l’entreprise pour en compléter les faiblesses et déterminer un positionnement marketing sur-mesure.
Déterminer le nouveau positionnement
Élaborer un nouveau positionnement oblige, par ailleurs, à mener une véritable réflexion sur l’entreprise et à bien analyser ce qui la différencie de ses concurrents. « Le positionnement est en effet une étape clé de la stratégie de communication. C’est un parti pris, qui sert de fil rouge tout au long de l’élaboration de la gamme. C’est un élément fondateur de l’identité de marque, son choix est donc déterminant, et se construit par un échange profond entre l’agence et l’entrepreneur » précise Agnès Bœuf.
« Durant cette étape fondatrice, l’entrepreneur doit déterminer et faire part de ses objectifs stratégiques et financiers mais également de ses objectifs plus personnels, voire de ses appréhensions » ajoute l’experte. « C’est un véritable travail d’introspection, qui nécessite une grande capacité d’écoute, mais surtout de s’immerger totalement dans l’entreprise, car seule une grande proximité mène à une relation de confiance solide » assure la responsable de l’agence AOC Conseil. Un point de vue que partage Bernard Pallisé, directeur de la cave Castelbarry. « Le changement n’est pas simple, la prise de risque est importante. Or, en bousculant les bases, l’équipe de l’agence AOC Conseils nous a amené bien au-delà de notre vision sécuritaire. Cette notion de confiance est donc fondamentale ».
Construire un message cohérent
Une fois le travail d’introspection mené, reste à travailler ou concevoir le ou les messages afin qu’ils soient intelligibles et en adéquation avec l’image de l’entreprise. « Le choix des messages doit également mettre en valeur les éléments clés de différenciation de l’entreprise. L’Enjeu : se distinguer mais également se positionner, prendre parti » précise Agnès Bœuf.
Le premier de ces messages est la Baseline. Courte, compréhensible immédiatement, elle reflète les valeurs de l’entreprise ou de ses produits. « La Baseline, c’est la petite phrase qui en dit long… C’est une sorte de signature de l’entreprise, conçue pour durer dans le temps, et considérée comme la toute première information sur l’entreprise. Voilà pourquoi la baseline qui datait de 2012 a été repensée et enrichie de la mention “ engagée ”. Désormais la nouvelle signature de la cave Castelbarry est “Coopérative Artisanale et Engagée”. Par le choix de cette signature, nous revendiquons avec fierté notre appartenance à la coopération. Nous faisons également l’éloge d’une viticulture éthique, engagée et raisonnée. La cave est d’ailleurs elle-même engagée dans une démarche durable depuis plus de dix ans. 80% de la surface du vignoble est certifiée Terra Vitis et 10% en Agriculture Biologique. Cette signature est donc une sorte d’hommage à cette terre, aux hommes et femmes qui expriment cette culture et cette philosophie » souligne Bernard Pallisé.
Proposer des visuels forts
« Au-delà du message, le positionnement choisi doit également se retrouver sur l’étiquette de chaque cuvée qui compose désormais la gamme de la cave coopérative Castelbarry » note Agnès Bœuf. Pour cela, l’experte, son associé Franck Pernet et le directeur de la cave ont fait appel à Alexandra Diaz, graphiste indépendante à l’agence AD-Creativ.
« En travaillant sur le nouveau positionnement de la cave, l’équipe de l’agence AOC Conseils a poussé le curseur assez loin. Il était essentiel que ce dépassement des lignes se retrouve sur les étiquettes. Alexandra a donc elle aussi été bousculée et poussée dans ses retranchements, pour provoquer l’inattendu, le dépassement de soi, la liberté » considère Bernard Pallisé. Le résultat : une gamme qui allie finesse et force du trait, avec des visuels qui renvoient parfois au dessin d’illustration ou qui reprennent la signalétique des affiches de propagande.
Car la particularité de la nouvelle gamme de vins de Castelbarry, c’est d’emprunter les codes graphiques d’univers bien distincts. « On retrouve ainsi un côté fluide voire aérien dans la nouvelle gamme Montpeyroux qui fait référence aux vents locaux. Pour les Terrasses du Larzac, le registre est davantage didactique et explicite, avec deux bouteilles qui interpellent tant au niveau du message que du visuel. La première est un hommage au Larzac, terre d’engagement, célèbre pour ses révolutions paysannes et sa lutte contre la pensée unique. L’autre fait référence à l’urgence d’agir pour sauvegarder notre planète. Le principe est de secouer un peu les esprits et de réveiller les consciences » ajoute Bernard Pallisé.
Articuler la nouvelle gamme
Si le message permet à l’entreprise de prendre la parole, le visuel de dévoiler son visage, la gamme d’un domaine ou d’une cave coopérative constitue sa première vitrine. Chaque cuvée doit ainsi posséder une place bien distincte. « Il est essentiel d’exprimer une promesse différente entre chaque cuvée pour que le consommateur puisse comprendre la montée en gamme en ne se reposant pas uniquement sur la hiérarchie classique des Appellations » note Bernard Pallisé. Ainsi, la nouvelle gamme de la cave a été réorganisée, structurée et hiérarchisée autour de marques fortes, de produits d’excellence mais également de produits innovants. La cave propose en effet désormais un vin sans sulfites ajoutés, « À tête reposée ».
« A la base de la segmentation se trouve la gamme Vin de France “ Les Coopains ”, qui revendique des valeurs de convivialité et de simplicité et qui valorise intentionnellement le monde de la coopérative » explique le directeur de Castelbarry. « Dans la continuité de celle-ci, la gamme IGP Saint-Guilhem-le Désert, baptisée “ Saute Rocher ” en référence aux habitants nommés les Saute Rocher ou Sauta Roc en occitan, vient souligner la fierté d’appartenance à un territoire empreint d’histoire et de tradition, telle que le pastoralisme » ajoute-t-il. Cette gamme « territoriale » est suivie de la gamme Languedoc d’Altitude : « Col du vent », dont les étiquettes ont été repensées et retravaillées il y a tout juste quelques mois « pour mieux se fondre et s’intégrer parmi les autres gammes » note le directeur. En outre, la cave propose une nouvelle gamme de Terrasses du Larzac, marquée par deux cépages caractéristiques de l’appellation, l’un à dominante Syrah, l’autre à dominante Grenache. « Nous sommes dans des gammes franches tant au niveau du message que du contenu » résume Agnès Bœuf. En tête de l’offre, se trouve la gamme Montpeyroux. « Cette gamme est le fer de lance de la cave. Elle exprime la finesse et la puissance qui font la réputation des vins de Montpeyroux et fait à elle seule la promotion d’un somptueux terroir bientôt couronné par le Graal de l’appellation communale » précise Bernard Pallisé.
Repenser sa mise en marché
Si concevoir une offre en adéquation avec un nouveau positionnement marketing est un projet long et fastidieux, le lancement sur le marché est l’étape cruciale.
Tout entrepreneur qui définit un nouveau positionnement et qui met au point une nouvelle offre marketing, envisage forcément des résultats favorables sur le plan commercial. Autrement dit, l’objectif visé est de couvrir les frais liés aux étapes de recherche et de conception, mais également de dégager des profits en vue d’assurer la croissance de son entreprise et d’acquérir une nouvelle clientèle. Castelbarry ne déroge pas à la règle. « Nous travaillions beaucoup jusqu’à présent sur le marché de l’export et auprès de la grande distribution. L’objectif, à travers ce nouveau positionnement et cette nouvelle gamme, est de revenir sur le marché traditionnel : cavistes, hôtellerie, restauration. Or, si jusqu’à présent nous n’étions pas prêts pour cela, désormais nous avons le moyens de nos ambitions » se félicite Bernard Pallisé.
Agence AOC Conseil
Agnès Bœuf
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